La formation des pianistes


ROLAND CLERY

Après avoir été repéré, et son réseau quasiment détruit, Roland Cléry part avec son chef de réseau à Londres, par avion. Il suit alors la formation au sein de la Patriotic School : 

"On s'est finalement posés à Londres.
Je suis allé à la Patriotic School, c'était pour le contre-espionnage.
On m'a posé des tas de questions : "d'où tu viens ? Où habites-tu ? Où as-tu fait tes études ?", etc.
Je répondais et les Anglais attendaient d'avoir confirmation de ce que je leur disais, par des agents de renseignements bien informés. J'étais dans une chambre confortable, en attendant.
J'étais ensuite reconvoqué, et ils me posaient des questions très précises en essayant de me piéger. Ils me délivraient de fausses informations, de faux noms, allant jusqu'à me demander si j'étais bien dans tel lycéen dans telle classe, avec tel professeur.

J'ai été admis. Je voulais être radio dans les chars. Ils m'ont proposé de retourner au lycée français de Londres. J'ai dit que je voulais continuer dans la résistance en France.
On m'a donc parachuté avec un émetteur radio.

Mais avant, j'ai suivi une intense formation. 

Pendant quatre mois, huit heures par jour, j'avais le casque sur les oreilles et les formateurs m'envoyaient des messages en morse. Ils augmentaient la cadence au fur et à mesure. J'étais devenu un as.
J'ai dû aussi passer un brevet de parachutiste. Le dernier saut, on le faisait d'une montgolfière. Il fallait enjamber la rambarde une fois arrivé en haut, et sauter.

J'ai été parachuté tout seul en France, à l'aveugle : "blind" comme ils disaient. Il n'y avait pas réception, car des copains avaient été capturés juste avant.
J'étais peu rassuré, j'avais peur de me casser quelque chose ou de me fracturer le bassin, comme cela arrivait souvent. J'avais peur aussi d'être déporté par le vent.
Une fois en bas, on avait une petite pelle. On devait ramasser le parachute, creuser un trou dans le sol et y enterrer la toile. Comme ça, si un fermier passait le lendemain matin, il n'y avait aucune trace de notre atterrissage.

Les parachutes étaient en soie. On avait du succès avec les filles, car elles pouvaient se fabriquer des corsages avec.

Je suis parachuté à 6 heures du matin vers Pontoise. Je me suis rendu à pieds dans une gare, puis direction Paris gare Saint Lazare. J'ai continué à trafiquer.
J'ai quitté mon réseau en septembre 1944, j'avais 17 ans."